SHOW-BIZ - BELGIQUE ANNÉES 60
AGENCES DE SPECTACLES ET ORGANISATEURS
DE SHOWS, CONCERTS, FESTIVALS
par Jean Jième
Festival de Chatelet ( photo J.Dresse)
Sur le plan de l'organisation des concerts ou festivals rock en Belgique, la situation était souvent cocasse. Mis à part, l'anversois Louis Devries, manager des Pebbles, le bruxellois Jean Martin directeur du Secrétariat des Artistes, le Mouscronnois Jean Vanloo, directeur du Twenty Club et manager des Sunlights, Rikki Stein, son associé), Paul André, responsable de la programmation au Club des Aigles, Wannyn à Chatelet et quelques autres, on rencontrait beaucoup d'aventuriers. Ou plutôt de fieffés amateurs.
Autant les professionnels cités ci-dessus avaient l'habitude d'exiger des conditions de travail au moins égales à celles des vedettes françaises, autant certains rigolos n'hésitaient pas à signer des contrats soit pour se faire plaisir, soit pour se faire mousser dans leur région, soit en espérant le pactole. La plupart n'avaient pas la plus petite idée du guêpier dans lequel ils allaient entraîner leur public, les artistes et eux-mêmes.
En effet, ces organisateurs, sans prévenir les agences, ne prévoyaient ni podium suffisamment large pour accueillir les artistes, ni éclairage digne de ce nom, ni loges convenable, ni même de service d'ordre. C'était l'improvisation la plus totale et une déplorable désorganisation.
Paul André, ancien du Club des Aigles et co-fondateur de l'Agence Century |
Jean Jième, cinéaste et co-fondateur de l'Agence Century |
Paul et moi, avons vécu des aventures hilarantes. Je songe à cet "organisateur" qui avait cru bon d'organiser un festival dans son champ, au milieu de la bouse de ses vaches. Sa profession : éleveur de lapins. Ce fut un flop. Redevable du cachet de la plupart des artistes, il nous proposa de payer ses dettes en centaine de lapins. Finalement acculé par ses créanciers, il fit faillite.
Parfois, nous avons frisé la catastrophe. Que penser de ces apprentis-sorciers qui n'avaient pas prévu la moindre bâche de protection en cas de pluie et qui s'attendaient à ce que les artistes jouent, trempés sous les gouttes ? |
Il est facile aujourd'hui de critiquer ou de se moquer de la manière aberrante avec laquelle beaucoup d'Anglais ont été reçus en Belgique. Mais il faut se replonger dans le contexte de l'époque. Les "vedettes françaises" jouaient plus souvent dans des salles que sur des podiums en plein air. Ils ne comptaient pas toujours sur leurs propres musiciens. Ils se faisaient donc accompagner par des groupes locaux, qui n'osaient exiger aucun confort. Lorsque les Britishs sont arrivés, ils ont craché dans la marmite de la bonne vieille popote yéyé. En deux ans à peine, ils sont parvenus à changer les goûts d'un public de plus en plus acquis à leur cause.
LES PREMIERS GROUPES ET CHANTEURS ANGLAIS QUI ONT DEBARQUÉ EN BELGIQUE
AVANT 1965
Vince Taylor est quasiment le seul artiste anglais qui soit venu chez nous avant les Animals, les Stones, Kinks et Cie. Annoncé à grand fracas de publicité comme le « plus grand casseur de fauteuils de tous les temps » Vince tenta de déchaîner les passions juvéniles d'une jeunesse assoupie. L'idiotie a voulu qu'on le fasse venir dans la salle du cinéma Eldorado. Ce qui ne s'était jamais fait auparavant. Résultat : des dizaines de fauteuils éventrés, des policiers courant dans tous les sens. Un show à moitié raté à cause de l'excès de zèle des forces de l'ordre. Date : le 26 janvier 1962.
Après un grand show à Paris, Gene Vincent passa par la Belgique et se produisit au Relais de la Poste (futur Twenty-Club) à Mouscron, le 27 janvier 1963. Puis il revint à l'Ancienne Belgique le 10 octobre de la même année.
1965
THE ANIMALS : Festival de la guitare d'or à Ciney ( 11 juillet) et à Chatelet (11 septembre).
DAVE BERRY : Bruxelles, à l'Ancienne Belgique ( du 19 au 24 novembre)
THE KINKS : Festival Guitare d'or à Ciney ( 11 juillet 1965)
1966
THE KINKS : Bruxelles à la Salle Régina à l'initiative du Club des Aigles ( 19 mars)
THE YARDBIRDS : à Bruxelles dans le cadre de Wolu-City ( mai)
VINCE TAYLOR : à Bruxelles au Brasseur (près de la Grand Place)
THE ROLLING STONES : à Bruxelles au Palais des Sports de Schaerbeek (26 octobre)
1967
JIMI HENDRIX : à Mouscron au Twenty Club ( mars)
THE WHO : à Bruxelles Wolu-City 2 (20 mai)
PROCOL HARUM -SHAKE SPEARS - MANFRED MANN au Festival de Chatelet (10 septembre)
1968
PINK FLOYD : à Bruxelles au Cheetah Club (février) - Au Théâtre 140 (4 et 5 mai)
MIKE STUART SPAN : à Bruxelles au Cheetah Club (mars )
THE MOODY BLUES et JULIE DRISCOLL : à Bruxelles à Wolu-City 3 (mai)
THE KINKS : Festival de Chatelet ( 8 septembre)
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Erik Machielsen (journaliste et photographe) ajoute : " Parmi les artistes anglais qui se sont produits en Belgique, avant que cela ne devienne une mode, il y a eu le Spencer Davis Group à l'Ancienne Belgique (ils ont étrenné Gimme Some Lovin', là-bas, avant donc que le disque ne sorte), Fredie and the Dreamers (en première partie d'Alain Barrière, encore à l'Ancienne Belgique), les Silkie (au Carabins, au club des aigles).
Je me rappelle d'une salle à Londerzeel ou plutôt d'une arrière salle de café(*) où j'ai vu se produire les Easybeats et plus tard Joe Cocker, Free, Jethro Tull, Cat Stevens, Engelbert Humperdinck et bien d'autres. C'est tout bonnement surréaliste! Venir à Londerzeel alors qu'ils cassaient tous la baraque en Angleterre!
(*)Cette salle de Londerzeel située en Flandres et dont j'ai oublié le nom, était le pendant neerlandophone du Mouscron Wallon.
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Reste à se souvenir qu'en 1967, la Grande-Bretagne ne faisait pas encore partie du Marché Commun. Aucun groupe anglais ne pouvait donc traverser la frontière sans subir de notables tracasseries administratives. En plus de leur passeport obligatoire, il devait remplir quantité de paperasses sensées reprendre la liste exacte de leur matériel. Et puis, il y avait la grande question du permis de travail. Les artistes anglais ne payaient pas de taxe sur leurs cachets en Belgique. Ils étaient donc fiscalement dans l'illégalité.
Durant des années, les agences ont travaillé dans une semi légalité. Mais devant le succès de plus en plus croissant des groupes anglais, les autorités belges et l'office des étrangers ont largement fermé les yeux.
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REPORTERS - CHRONIQUEURS - PHOTOGRAPHES -
Parmi ceux qui travaillèrent sans relâche à faire connaître le rock anglais en Belgique, à rédiger la bonne information, à la répercuter auprès du public, à réaliser les premiers vrais reportages photos citons :
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