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LES PIONNIERS DU ROCK
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AMERICAN WEEKS
En mai, nouvel évènement d'importance avec cette fois la quinzaine américaine. Bruxelles est à nouveau à la fête. Un peu partout l'american way of life est mis à l'honneur. A l'Innovation, cette fois, c'est le groupe vocal américain The Golden Gate Quartet accompagné par Kenny Clarke batteur et leader avec ses musiciens qui assureront les prestations.
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Pour clôturer la soirée, les créateurs de A White Shade of Pale : Procol Harum |
Le vendredi 25 août 67, nous faisons partie de l'affiche du troisième festival de Jazz à Bilzen. Pour la première fois, les organisateurs ont prévu une journée spéciale consacrée au rock. Il y a une belle distribution avec quelques groupes belges dont Adam's Recital, avec Jacky Mauer, l'ancien batteur des Partisans.
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LA VALSE DES GALAS
Comme c'est déjà l'été, nous partons pour Zeebrugge pour quelques concerts dans la discothèque de Marc Aryan "La Barqu'à Jack". Ensuite, Bernard Mahy nous envoie en France à Thoissey dans l'Ain, juste en dessous de Mâcon.
S'y déroule un petit festival sous chapiteau qui, chaque année connait son petit succès en accueillant plusieurs vedettes françaises. Le public nous assimile pour un groupe anglais, comme ce fut le cas auparavant avec The King Bees dans le Nord de la France.
Notre mini-tournée se termine à Ostende par trois soirées à La Coupole, un établissement tenu par l'oncle de Guido Delo, claviériste du J.J.Band.
COMBLAIN-AU-JAZZFin août 67, nouvelle incursion dans le monde du jazz. Le célèbre festival de Comblain-la-Tour qui avait fait venir Ray Charles, John Coltrane et tant d'autres géants du jazz a fait long feu. Désormais, c'est à Comblain-au -Pont, commune voisine que va s'organiser la relève.
On détonne un peu dans le décor avec nos tenues militaires écarlates. Nous retrouver avec des pointures du jazz pourrait prêter à rire et pourtant dès que nous nous mettons à jouer notre répertoire, le public nous écoute, apprécie et finit par nous réserver une ovation digne des plus grandes stars du jazz présentes ce jour-là.
Nicolas Dor, éminent critique et présentateur d'une émission de Jazz à RTB Liège, écrira dans la presse du lendemain que notre apparence laissait à penser que nous étions un orchestre de rock mais que nous avions un talent rare pour interpréter le blues et le jazz électrifié. Nous apprendrons dans la foulée que ce que nous appelions du jazz-boogie est en fait du hard-bop. Cette appellation nous était totalement inconnue.
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CHATELET 1967Le samedi 9 septembre se tient, comme chaque année, le festival de Chatelet avec sa pléiade d'artistes en tous genres. Nous faisons partie du plateau. La vedette de l'après-midi s'appelle Manfred Mann.
Nous ne pourrons pas assister à sa prestation, car ce même jour, nous devons effectuer un doublé. Nous sommes attendus à Louvain au Grand Palais de l'Exposition pour un autre festival.
A notre arrivée, nous faisons la connaissance de Coffee Set, un groupe anglais qui réside en Belgique. Plus tard, Don Attewell rejoindra le Sweet Feeling et John Colston atterrira dans Convention.
A peine avons-nous débarqué à Louvain, que nous apprenons par l'organisateur que le groupe de Manfred Mann fait également partie du programme de la soirée. Ils arrivent durant notre prestation. La direction nous demande alors de jouer quelques morceaux de plus afin de permettre à leurs roadies de monter le matériel sur scène.
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Duckx et Bruno se lancent dans l'écriture. Ils pondent trois titres, dont le slow Rain, un tantinet psychédélique avant l'heure. Bernard Mahy nous dégotte une petite firme de disques dénommée Hebra, dont le patron n'est autre que Jean Darlier (futur président de la Sabam).
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RENCONTRES MANQUÉES
- Nous décidons de changer de salle de répétition. Nous amenons notre matériel au Waltra Theater, un établissement situé derrière le théâtre flamand. Il y a le café et deux salles de répétitions. Dans l'une d'elles, répète un autre groupe dont je fais part de l'existence à Bruno.
- Je sais , me dit-il, ce sont des musiciens classiques qui s'essaient un peu aux Beatles avec Yesterday et Eleanor Rigby .
En fait, il s'agissait du groupe Stradivarius, le premier groupe de Raymond Vincent qui fera plus tard partie du Wallace Collection et deviendra co-fondateur d'Esperanto avec Bruno ! Comme quoi !
- Al Goyens nous fait savoir qu'à lieu dans son club, le Blue Note, un concours pour jeunes musiciens de jazz. Bien sur, nous nous y inscrivons.
Duckx achète quelques partitions de Jazz et nous nous mettons à répéter intensément, avec la ferme intention de l'emporter . Entretemps, Bernard Mahy, qui nous a trouvé un contrat, insiste pour que nous désistions. La mort dans l'âme, on s'exécute.
Après le week-end, Duckx nous dit : vous savez qui a gagné le concours ? Nous nous attendions à voir triompher un saxophoniste, trompettiste ou même un pianiste. Et bien non, pas du tout. C'est un guitariste qui remporte le premier prix : un certain Philippe Catherine, déjà un virtuose, malgré son jeune âge.
LE CONTRAT QUI VENAIT DU FROID
En décembre 67, Bernard Mahy nous parle d'une éventuelle tournée de trois semaines en Tchécoslovaquie. Nous nous demandons quel peut bien être l'intérêt des huiles Vandemoortele de nous envoyer dans un pays de l'Est, qui ne vend pas ses produits.
Reste Serge, le bassiste, et moi. Nous ne suivons pas de cours et nous sommes sans boulot. Ce sera comme des vacances payées.
Après bien des péripéties pour trouver des musiciens de remplacement, nous obtenons l'accord du claviériste Christian Seha (Eagles) et du guitariste Jacky Nellissen. Tous les deux ont déjà joué en Russie avec Marc Aryan. |
Il nous faut un chanteur d'appoint. Qu'à cela ne tienne, on engage notre roadie, Daniel Mairesse, surnommé Schmoll, en raison de sa ressemblance frappante avec Eddy Mitchell.
En à peine deux semaines, à raison de dix heures par jours, nous parvenons à constituer un répertoire de soul-music. Lors d'une brève rencontre, pas très marrante, Bruno et Duckx sont priés de remettre leurs costumes de scène à leurs remplaçants.
Bernard Mahy et moi, sommes fraîchement mariés. Ni l'un ni l'autre n'avons envie de laisser nos épouses toute seule à la maison. Alors il a une idée. Pourquoi ne pas les emmener en Tchécoslovaquie ? La femme de Bernard poussera la chansonnette pour deux morceaux et initiera la jeune Madame Mahy à quelques pas de danse. Cela nous fera des gogos girls à bon marché. |
TOURNÉE EN TCHÉCOSLOVAQUIE - 1968
Christian Seha et Daniel Mairesse dit Eddy Schmoll
lors d'un transfert dans une gare ferrovière
C'est le jour du départ. Notre train-couchette passe par Liège et laisse monter un groupe de quatre musiciens et de trois chanteurs, semble-t-il, pour la même destination que nous. A Vienne, un autobus tractant une énorme remorque destinée au matériel, nous embarque tous. Le périple se poursuit jusqu'à Bratislava en Slovaquie. La température avoisine désormais les moins vingt degrés. Les flocons tombent sans discontinuer. Affables, les douaniers, pratiquement invisibles dans la neige, montent vérifier nos passeports tout en nous réclamant des autographes.
L'organisateur de cette tournée mémorable, c'est Joe Napoli, cet ex G.I., qui s'est pris d'amour pour le jazz, au point d'organiser des festivals annuels à Comblain-la-Tour.
L'homme nous accueille avec gentillesse, nous laisse prendre une bonne douche bien chaude. Lors d'un briefing, deux heures plus tard, il nous annonce une répétition générale avant les dix-sept représentations que nous donnerons dans toutes les grandes villes du Pays. Pour la Tchéquie, je me rappelle de Brno, Prague, Karlovy Vary. RÉPÉTITION GÉNÉRALE
Désormais, nous serons sous la « protection » de notre chauffeur de bus attitré et de Vera Baumanova, respectivement notre interprète, la présentatrice, lors des shows et la responsable de l'ensemble de la tournée.
Il faut savoir que la tournée a été montée grâce au bon vouloir des responsables nationaux du parti communiste tchécoslovaque, qui considère toujours les fans de rock comme des dissidents.
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SHOWSPendant dix-sept jours, voilà comment les shows vont se dérouler. Notre présentatrice annonce le premier orchestre de la soirée. Il s'agit en fait du quartet embarqué à Liège. Celui-ci accompagnent les trois chanteurs, respectivement pour trois chansons chacun. Leur répertoire variant d'Alain Barrière à Richard Anthony. Après un court entracte, la présentatrice revient pour nous annoncer à notre tour. On attaque avec un instrumental des Bar-kays, Soul Finger. Puis intervention d'Eddy Schmoll avec The Letter des Box-Tops. S'ensuivent: Hold On, I'm Comin' de Sam & Dave, In the Midnight Hour de Wilson Picket, Knock on Wood d'Eddie Floyd, etc...
Le final se déroule selon l'habituel cérémonial. Toute la troupe des artistes revient sur la scène, salue comme au théâtre et entonne : ce n'est qu'un au revoir, mes frères. A l'issue de la première prestation, j'adresse certaines remarques à la cantonade. Je trouve qu'on n'a pas vraiment joué ensemble, qu'on a manqué de vigueur J'ai alors l'idée de proposer à Serge, qui tient la basse, de jouer tous les titres à une vitesse légèrement supérieure aux versions originales. Ca sonne nettement mieux. Dès le lendemain, la dynamique s'améliore, le tonus se renforce.
Cette manière d'interpréter la soul musique noire, me fait penser à du Rythm & Blues de blanc.
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Malgré les basses températures, les salles de spectacle se remplissent chaque soir et même durant la semaine. La plupart du temps, nous jouons dans des salles de théâtres avec rangées de fauteuils et parfois balcons et mezzanines.
Durant la tournée, nous ne disposerons que d'un seul jour de repos. Tous les chanteurs de la troupe, à l'exception de notre Eddy, souffriront d'une extinction de voix. Des médecins, appelés d'urgence, parviendront à les remettre sur pied en un temps record, grâce à une injection d'un produit aux vertus aussi mystérieux que revigorantes.
A n'en pas douter, en cas de vérification, nos quatre chanteurs, auraient très probablement étés contrôlés positifs.
LE PHÉNOMÈNE «SCHMOLL»
Les bus chargés des déplacements à travers le pays.
Le second sert au transport du matériel
Propulsé vedette du jour au lendemain, notre roadie-chanteur est déjà une forte tête en soi. Il va donc progressivement se comporter selon son nouveau statut de star.
Première échauffourée. Le conducteur du bus avait pris l'habitude d'embarquer la roue de secours de son véhicule sur la banquette arrière, nous privant, par la même occasion, de pouvoir s'allonger et d'y dormir quelques heures. En effet, les déplacements étaient interminables, et avec le verglas, le bus ne roulait qu'à une quarantaine de kilomètres à l'heure. Chaque étape pouvait prendre une journée entière.
Bref, nous décidons de déplacer cette roue. Le chauffeur exige que nous la remettions à sa place. Eddy refuse. Mais l'homme est sacrément têtu, il ne veut rien entendre.
La discussion s'anime. Eddy est du genre bagarreur, il a le coup poing facile. Le drame est évité de justesse. Eddy finit enfin par se calmer. Pour toute la durée de la tournée, le tchèque va désormais le baptiser "The Tiger".
Le lendemain de ce premier incident, Schmoll, sensible au charme slave, s'entiche d'une ravissante poupée russe. Il passe la nuit dans ses bras et, au petit matin, décide de l'emmener dans le bus pour poursuivre la tournée en sa compagnie.
Mais Bernard Mahy refuse, Eddy s'entête à nouveau et menace de ne plus chanter. Le bus est prêt à démarrer. Il refuse d'y monter alors que tout le monde l'attend déjà à l'intérieur. Après de longues palabres, Joe Napoli, excédé mais diplôme, parvient finalement à le raisonner en lui disant : tu reviendras plus tard, tiens prend un stylo et écris son nom et son adresse.
LE STADIUM
Christian Seha, Jacky Nellissen, Serge Zanello,François Van Eeckhaute et
Eddy Schmoll à l'avant-plan - Samoreds 1968 - Tchécoslovaquie
Le dernier concert se déroule à Kosice, une localité proche de la frontière russe. On nous fait pénétrer dans un stade gigantesque. Il me fait penser à l'ancien vélodrome de Schaerbeek ou j'ai vu les Stones ne remplir qu'un tiers de l'espace (pourtant après leur tube Satisfaction).
L'on nous explique qu'il y a quelques Tchèques et quelques Slovaques parmi les spectateurs, mais qu'ils parlent un autre dialecte. Ca promet ! |
Malgré les barrières de protection, dès le début du spectacle, et surtout au moment où Nathalie entame Yesterday les premiers rangées de spectateurs essayent de se ruer vers le podium,. Ils paraissent déchaînés. Les policiers sont obligés de cogner avec leurs longues matraques.
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LA FIN D'UNE ÉPOQUE
De retour en Belgique, le père de Bruno Libert exige une entrevue avec Mr Vandemoortele. Il explique au PDG qu'il n'est plus question que son fils reste musicien des Samoreds. D'autre part, Duckx annonce qu'il va bientôt être appelé sous les drapeaux. Rendez-vous est pris avec les quatre musiciens du groupe, Bernard Mahy et Vandemoortele. Au terme de la réunion, le contrat est tout simplement déchiré. Nous sommes à nouveau libres.
Jamais, les Samoreds ne lui auront fait vendre un paquet de chips de plus ou de moins.
Ce jour-là, Bernard Mahy nous demandera à Serge et à moi de restituer nos mythiques vestes rouges. J'ai trouvé cette fin des Samoreds humiliante.
Encore aujourd'hui, plus de quarante ans plus tard, je me vois encore retirer mon emblématique décoration. C'est fini. Nous déposons les armes, non sans avoir pourtant le sentiment d'avoir accompli de bons et loyaux services.
Nous n'en resterons pas là. Après une refonte du groupe, nous formerons Small Rhapsody.
Remerciements à Serge Zanello ………………….
Disparition à 66 ans de notre ami Freddy Kielbaey, né le 31 juillet 1947.
Son décès remonte au 31 janvier 2014.
Dossiers annexes: Les King Bees