RAC POP FESTIVAL
PALAIS 10 - HEYSEL - BRUXELLES
13 septembre 1969

D'après les articles parus dans les Télé Moustique N° 2280.
Ouf ! Les popmen bruxellois ont eu chaud. Avec la suppression de Wolu-City, ils pouvaient craindre ne rien avoir dans la capitale cette année. Le RAC Pop Festival vient à point pour mettre fin à leurs inquiétudes. C'est organisé par les jeunes du Royal Automobile Club et, dans un sens, c'est un peu la réponse de la partie francophone du pays au Pop-Event d'Anvers.
Le programme est chargé, il y a quelques groupes qui sont « vachement » bons et qui attireront les spécialistes de tout le pays. Les vedettes du festival seront précédées par un concours d'orchestres. Mais les organisateurs ont particulièrement insisté sur le fait que ce concours sera sérieux. Il y aura du reste deux jurys. L'un composé de personnalités diverses, et l'autre de spécialistes (enfin j'espère) de la presse, du disque et de la radio. Si vous faites partie d'un groupe amateur, vous pouvez vous inscrire en confiance.
Personnellement j'espère que le public bruxellois se montrera à la hauteur de celui de Bilzen ou d'Anvers. Ils se composaient de gens qui étaient venus non pas par simple curiosité ou en se disant : « On va peut-être draguer une nana », mais bien pour écouter et apprécier la musique de leur génération. PIERO
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Quand le public est la vedette...
Trois mille ? Quatre mille ? Je ne sais pas, mais ils étaient là. « Ils », ce sont ceux qui aiment la bonne musique, qui l'écoutent, l'apprécient, l'applaudissent. Oh ! On ne peut pas dire qu'ils aient été gâtés : le hall immense dans lequel se déroulait ce premier RAC POP Festival résonnait comme un tonneau vide, les sièges étaient insuffisants, le spectacle trop long. Mais les jeunes qui étaient présents ont fait preuve d'une bonne volonté et d'une gentillesse peu commune.
JE N'AVAIS ENCORE JAMAIS VU UN PUBLIC AUSSI INTELLIGENT en Belgique. C'étaient des jeunes ; ils pouvaient en remontrer à d'autres publics de plus âgés. IL N'Y A PAS EU LE MOINDRE INCIDENT. Une poignée de policiers brillait par son inutilité. Est-ce pour cette raison que la police obligea les organisateurs à clôturer le festival à une heure du matin, empêchant Cuby and the Blizzards de se produire ?
Le Heysel est inhabité, le bruit ne pouvait déranger personne. De nombreux jeunes avaient volontairement raté leur dernier tram ou leur dernier train pour voir le fameux groupe hollandais. La police ne voulut rien savoir. Cuby et son groupe ont été payés, ils étaient prêts à monter sur scène.
Paul André, du secrétariat des artistes, qui dut annoncer la nouvelle aux Blizzards, m'a dit : C'est quelque chose que je ne voudrais pas recommencer dans ma vie ; vraiment, j'avais honte . Ainsi parce que quelques policiers décident qu'il est temps d'aller au lit, des jeunes qui s'amusent sans déranger personne, dont certains ont épargné longtemps pour se payer le déplacement jusqu'à Bruxelles, ont juste le droit de se taire. Il n'y a pas eu de manifestations à la fin du spectacle : c'aurait été donner une excuse à ceux qui l'ont arrêté. Les jeunes ont quitté la salle en silence... Un silence qui en disait long. |
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Des amateurs qui y croient.
Pourtant, mise à part la résonance du son, le spectacle a aussi connu des moments beaucoup moins tristes. Le concours d'amateurs fut parfait. Bonne volonté, en général, chez tous ces débutants. On sent qu'ils sont pleins d'enthousiasme. Jury intelligent qui décerne le premier prix au groupe faisant preuve de la plus grande originalité : Here and Now complètement dément, avec deux petites filles qui dansaient, une troisième plus grande, très jolie, et des musiciens disparates se lançant dans une session incroyable.
Here and Now les gagnants du concours
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TENDERFOOT KIDS - TOMAHAWK BLUES BAND - THE PEBBLES
CARRIAGE COMPANY - MEDIUM
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C'est la première fois que le Tenderfoot Kids se produira à Bruxelles. C'est un groupe de Verviers, et il est excelent. Leurs harmonies vocales, notamment, n'ont rien à envier au Wallace Collection ou aux Pebbles.
Ils ont sorti deux disques jusqu'à présent : Tomorrow The Moon et Apollo 11. Deux disques très bons, et il ne serait pas étonnant de voir bientôt figurer Tenderfoot Kids au Hit Parade, ils le méritent.
Ce sont d'authentiques professionnels, qui jouent ensemble depuis plusieurs année de là leur qualité. Ils sont quatre : trois guitaristes et un batteur.
Tenderfoot Kids (Jacky William, George et Claudy) |
Depuis des années qu'ils parcourent les routes de Belgique, les Pebbles n'ont fait, que de très rares prestations à Bruxelles, et encore était-ce dans de petits clubs, jamais dans une grande salle. Ce sera donc pour le deuxième groupe de Belgique l'occasion de rencontrer enfin le grand public bruxellois qui l'attend depuis longtemps.
La réputation des Pebbles n'est plus à faire. Tout ce qu'on leur demande, c'est de devenir de plus en plus personnels et de retirer progressivement de leur ré pertoire les compositions des autres au profit des leurs. Leur dernier disque : Incredible George.
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Les Pebbles |

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Des Bruxellois. Ce groupe est composé de solides éléments : le chanteur a une bonne voix, et le batteur, Wawa, est sans doute, de tous les musiciens mâles de Belgique, celui qui sait chanter le plus haut. C'est un vieux de la vieille, il faisait partie des Night Rockers et du Crash, avec Christian Janssens du Wallace. Le premier disque du Carriage Company The Beasts a connu un réel succès, il a même été quatrième au H.P. de Francine Arnaud, à la RTB. Leur arrangement de Good Vibrations, vaut la peine.
Angelo Antioco |
Comme le Rac Pop a lieu à Bruxelles, on ne pouvait pas ne pas prendre le Tomahawk Blues Band à ce festival. Ils sont les petits chéris des amateurs de blues bruxellois, et il ne fait aucun doute qu'ils seront très favorablement accueillis. Nous vous avons déjà parlé, à l'occasion du Pop-Event de Deurne, des prouesses instrumentales de Michel Clément, bien connu dans la capitale sous le pseudonyme de « Clemme ». C'est un des meilleurs guitaristes belges. Depuis Deurne, le Tomahawk a réduit ses effectifs à trois : soliste, bassiste et batteur. Luc, le bassiste, est un ancien membre du Klan.
Michel Clement |
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Medium. Un groupe français. Celui qui aurait normalement dû gagner le concours de la Guitare d'Or à Ciney. C'est un trio, et il s'inspire directement du Cream, dans le répertoire duquel il puise allègrement et avec bonheur. C'est intéressant de voir qu'enfin il y a des Français qui se sont mis à la musique pop et qui ne se débrouillent pas mal.
Tommy Botomizy, soliste et chanteur, Christian Danis, à basse, et Philippe Domade, à la batterie (on ne garantit pas l'orthographe), sont les membres du Medium. Marrant : le batteur ressemble à Pete Townshend. |

Medium |
THE MARBLES - JESS AND JAMES - HEAVY WEIGHT

The Marbles
The Marbles. Deux très sympathiques et très farfelus cousins australiens. Ils ont été lancés par les Bee Gees...
Rappelez-vous leurs deux succès : Only One Woman et The Walls Fell Down.
Ils viennent de sortir un nouveau titre chez Polydor : I Can't See Nobody encore une composition des frères Gibb.


A gauche : Jess and James © J. Jième - A droite: Stu Martin

Heavy Weight (anciens Shakespeares) © Jean Jieme
Prévus au programme, mais ayant été victimes d'un accident de la route trois jours auparavant,
les Marbles, hospitalisés, furent remplacés par deux surprises.
La première était la nouvelle formule de Jess and James. Fameux! Leur batteur Stu Martin : un régal.
La deuxième : trois anciens membres des Shakespeares + un ancien Grapefruit
Heavy Weight. Débuts prometteurs mais la formule est à roder.
THE WEB - EIRE APPARENT - THE GUN - COLOSSEUM

The Web
Le Web est un groupe paradoxal. En le voyant monter sur scène, on s'attend à écouter un groupe soul.
Lorsqu'on écoute son single : Monday to Friday, on se dit que leur style s'apparente aux Equals.
A l'écoute de leur L.P. on découvre un groupe progressiste. Avec eux, tout dépend des jours, de leur humeur.
On peut donc s'attendre à tout.
Ceci dit, le Web fut le premier groupe à obtenir un son convenable dans ce temple de l'écho qu'était le Palais 10.
La qualité des musiciens du groupe semble avoir mis d'accord les plus difficiles.
Eire Apparent
Eire Apparent mit le paquet pour effacer la mauvaise impression qu'il avait laissée à Bilzen,
Le public hurla sa satisfaction. Des « Moustique » avaient été distrib ués à l'entrée.
D'enthousiasme, on les jetait en l'air.
Tout le Palais en fut bientôt recouvert.
Ce qui était plus propre et plus confortable pour s'asseoir.
Pop sur un lit de « Moustique » , original.

Colosseum © jHdg

Colosseum :James Litherland, Dick Heckstall-Smith, Dave Greenslade,
John Hiseman, Tony Reeves © jHdg
Pas de surprises : Colosseum, = summum.
Le summum de la soirée fut atteint avec le Colosseum, en particulier avec le solo
de batterie de Jon Hiseman, longuement acclamé.
The Gun © jHdg
Le Gun n'eut droit qu'à un quart d'heure de prestation. (Il était une heure du matin.)
Il parvint tout de même à démontrer que pour un groupe "heavy", il se défend à la guitare sèche.
Cuby and The Blizzards, qui avait attendu toute la journée, fut privé de podium
par les autorités policières qui obligèrent les spectateurs à quitter les lieux. Un véritable scandale.
On remet ça !
Les organisateurs sont satisfaits ils recommenceront l'année prochaine.
Fernand Indestegh et Thierry Van De Werve, les deux âmes de ce Rac Pop,
m'ont dit : Ce n'était pas parfait, mais il faut un commencement à tout.
Nous avons beaucoup appris tu vas voir, l'année prochaine !
- Dans la réalité, il n'y aura jamais de second Rac Pop.
- Ce dossier a pu être réalisé grâce à l'article paru dans le N° 2280 de Piero Kenroll de Télé Moustique-