BIBLIO ROCK

 

Retour sur la page BIENVENUE

Chapitre 1 : Cravate

 

Chapitre 2 : "Un individu malfaisant"

 

Chapitre 3 : Summer 69

 

Chapitre 4 : 1969, l'année du siècle

 

Chapitre 5 : Dawn of the seventies

 

Chapitre 6 : Wight 70

 

Chapitre 7 : La Ferme!

 

Chapitre 8 : fin 1970 L'explosion

 

Chapitre 9 : Déglingue du rock belge

 

Chapitre 10 : Monstres Sacrés

 

Chapitre 11: Charisme

 

Chapitre 12: Glam Rock - Le Schisme.

 

Chapitre 13: Rock 73

Genesis-Jemelle-Bilzen

 

Chapitre 14: Rock 74

Stones - Rapsat.

 

Chapitre 15: Les grands concerts de 1974

 

Chapitre 16 : Rock et Journalisme

 

Chapitre 17 : Épilogue

 

 

 

LIVRES-ARTISTES

 

Machiavel 40 ans de musique

 

La France et les Beatles (Hocquet-Krasker)

 

Beatles Jours de vie Richard Havers

 

1969 - Année Rolling Stones - Let It Bleed

(Ethan Russell)

 

Qu'en pense Keith Richards ?

(Mark Blake)

 

Cliffhistory

(Robert Morgan)

 

The Man Who Led Zeppelin

Chris Welch

 

Elvis - Last train to Memphis-Careless Love

P.Guralnik

 

Elvis en devenir Alfred Wertheimer

 

Chuck Berry - Long distance information (Fred Rothwell)

 

Jacques Dutronc

(Michel Leydier)

 

Johnny et Nous : 50 ans de rock

J.Q. Gérard

 

Johnny Sixties

(J.P. Leloir)

 

Hallyday-Derniers secrets

Przybylski

 

Rock'n'Romance Nanette Workman

 

 

LIVRES-AUTEURS ROCK

 

Autant en emporte le rock

(J.N.Coghe)

 

Amougies 24/28 octobre 1969

(J.N. Coghe)

 

Coeur de Rock

(Piero Kenroll).

 

L'école de Canterbury

(Aymeric Leroy)

 

Ancienne Belgique, salle de légende

Johan Ral

 

Golden Years

(Paul Coerten).

 

Smalls (Small Faces)

(J.N.Coghe)

 

Nos années Salut les Copains

Christophe Quillien

 

The Big Beat Scene

Royston Ellis

 

Jésus prend la mer

(James L.Burke)

 

Rock Critics

Feel like going home (P.Guralnik)

 

Antibes Juan-les-Pins-50 ans de jazz 

 

American Rock'n roll UK Tours 1956-72 (Ian Wallis)

 

Rock and Roll duo Kenroll-Guyaut

 

50s Today

Charles Chojnacki

 

 

CONCERTS

 

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Paul Anka Forest National 21/11/2009

 

Cliff Richard Forest National 8/11/2009

 

DVD

 

Dusty Springfield

 

Paul Anka Rock Swings - 2009

 

Cliff Richard Final Reunion - 2009

 

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Vince Taylor -Chemin de la mauvaise route

 

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1969 - ANNÉE ROLLING STONES 

LET IT BLEED 

ETHAN RUSSELL - Éditions Michel Lafon

Livre rock The Stones

 

 

L'AUTEUR


Ethan Russell est un Américain privilégié, né à New York, mais qui a passé sa jeunesse à San Francisco. Son privilège, c'est d'avoir vécu de sa passion au plus fort des folles années soixante. Passant des vacances à Londres en 1967, après quelques mois il bénéficie de «la» rencontre qui le précipite dans l'univers du rock, en expansion perpétuelle. Il s'intègre à la jeune équipe, plus hippie que yuppie (cela, c'est pour plus tard) de la revue Rolling Stone...et il se met à photographier les plus grands: les Stones, Beatles, Who, etc. Plus tard il réalise des vidéos de gens comme Emmylou Harris, Joni Mitchell, Paul Simon etc.

 

LE LIVRE


Le recueil dont question ici est originellement paru le 2 novembre 2009 chez Grand Central Publishing: Let It Bleed  The Rolling Stones, Altamont, and the End of the Sixties. Un ouvrage de grand luxe est déjà paru chez Rhino en 2008, vendu uniquement à des amateurs fortunés. Je ne l'ai pas vu, mais il diffère de celui-ci, en présentant de nombreuses photos supplémentaires de cette tournée de 1969 ! 


Tout d'abord, précision indispensable: il ne s'agit PAS de clichés qui auraient été pris lors de sessions d'enregistrement de ce fameux album Let It Bleed. C'est bien entendu une allusion au sinistre concert d'Altamont, le 6 décembre 1969: triste Saint- Nicolas... 

 

Russell raconte son parcours, et ses aventures avec les Stones. Du moins celles survenues en cette année 1969, qui marque à la fois l'apogée de la contre-culture, de la gloire du rock et de la prise du pouvoir (encore que...) par une jeunesse idéaliste et débridée, voire exaltée.

 

Pour beaucoup, le drame d'Altamont marque la fin, ou le début de la fin des 60's, du rêve des sixties. À savoir la violence, qui commence bien avant la prestation stonienne ce jour-là, jusqu'au meurtre à l'arme blanche d'un jeune Noir: Meredith Hunter par un Hell's Angel.

 

Avant d'en arriver là, presque la fin du livre, Russell nous montre des clichés des Stones plus splendides les uns que les autres - tant les photos que les musiciens !


La plupart sont en noir et blanc, mais la couleur n'est pas absente, en un panachage de bon goût. On savoure ces scènes de Brian chez lui (en couleur), situées par l'auteur au printemps 69, sans plus de précision, et qui nous font (re)découvrir un Brian primesautier, voire faussement violent, lorsqu'il s'en prend à...une statue ! On s'étonne parfois d'un certain manque de détails, mais cette réserve est vraiment minuscule.

 

Face à l'objectif de Russell pour ce qui précède, le futur ex-Stones se trouve dans le jardin de sa maison de Hartford, Cotchford Farm. Devant le désappointement d'un Russell pas enchanté de son travail, Brian s'est vêtu d'une chemise découpée dans le drapeau américain ! 

 

Voir p.27, une photo particulièrement réussie. L'auteur se remet au noir et blanc le 5 juillet 1969, au concert gratuit et presque immédiatement mythique de Hyde Park, devenu par la force des choses un adieu poignant au génial mais tourmenté Brian Jones. L'homme qui, selon la légende, pouvait apprendre à jouer d'un instrument en une demi-heure ! On peut rester un peu sceptique, mais le talent et le charisme de l'infortuné musicien sont reconnus à jamais.

 

 

 

LA TOURNÉE AMÉRICAINE - NOVEMBRE 1969


Russell suit le groupe dans une tournée-charnière pour les Stones, aux States, du 7 au 30 novembre 1969. Avec un épilogue tragique, comme on sait, le 6 décembre.
L'histoire de ce témoin du premier rang, et mémorialiste / illustrateur, nous tient en haleine...Que celle-ci sente le kif, le shit ou rien du tout !

 

 

En p.74 -vous y trouverez le contexte exact ! - on découvre où, quand et comment naît cette appellation de «plus grand groupe de rock and roll du monde» ! Pourtant, le Led Zeppelin peut commencer à prétendre à cet honneur dès cette époque, mais la qualification superlative leur est restée.

 

Des éléments importants sont ici apportés. C'est la première fois que le public écoute vraiment là-bas en 1969, après la période des gamines hurlantes, qui ont fini par avoir raison de la motivation des Beatles à se produire en public, entre autres choses. 


Que l'on soit d'accord ou non: c'est à chacun de juger. On insiste aussi sur les immenses capacités du remplaçant de Brian: Mick Taylor, moins «star» peut-être, mais carrément le meilleur musicien des Stones. De l'avis de Wyman certainement. En p.94, Ethan Russell définit bien le malentendu qui a plané chez beaucoup au sujet du sens, de la signification que les Stones donnent à Street Fighting Man.

 

Clairement, leur musique, leur carrière et leurs plaisirs restent leurs priorités. Les sympathisants du diable (en chanson du moins...) ne tentent pas sciemment d'améliorer la société, même si leur exemple fracassant a fortement contribué à la faire avancer dans la direction que nous savons, celle du culte de la jeunesse, du rejet du vieux monde et de l'establishment.

 

Les Stones n'en font pas encore tout à fait partie (des institutions), à cause notamment de la vindicte perpétuelle de la police et des autorités contre eux, ou surtout Mick, Brian et Keith. 

 


ALTAMONT

 

On a glosé à l'infini sur le désastre d'Altamont. Il est bon de lire la version de Russell, aussi légitime au moins que celle de bien d'autres. Ce qui est terrible, c'est la vérification ici du vieux proverbe : «L'enfer est pavé de bonnes intentions»...

 

Dans une conférence de presse qui, peut-être, se révèle a posteriori un piège, Jagger accepte le principe d'un concert gratuit. Histoire d'être en phase avec une grande attente du public et des médias, si j'ai bien compris. On a peut-être un peu forcé la main à des Stones que plus personne ne pourrait manipuler aujourd'hui, et ce depuis longtemps !


Cette grande fête est presque improvisée, le lieu (trouvé à l'arraché en dernière minute) se révèle très peu propice à ce raout rock and roll: une cuvette, dans le circuit automobile d'Altamont...Un nouveau (mini)Woodstock, mais totalement raté.


Dès le passage du Jefferson Airplane, Marty Balin se fait agresser par un Hell's Angel !


Tout dégénère très vite, et je vous invite à vous plonger dans le récit de ce qui devient un vrai cauchemar. La mort du jeune Noir (porteur d'une arme à feu, et qui aurait pu tirer - un fait à ne pas négliger) marque le début d'une pagaille insensée, qui se change presque en panique.

 

 

On constate qu'aucune autre victime à déplorer, même parmi les Stones et leurs accompagnateurs (dont Russell donne la liste: notamment deux éminents journalistes: Stanley Booth et Michael Lydon), cela tient du miracle.

 

En 2010, peut-on écrire carrément que les Stones sont des survivants d'Altamont ? Eh bien, selon moi oui. Je n'y étais pas (vous vous en doutez !), mais le compte-rendu de Russell semble parfaitement clair et cohérent.

 

 

 

En tout cas, on se rend compte que cet échec monumental n'a peut-être tenu qu'à une mauvaise organisation précipitée. À un concours de circonstances particulièrement détestable, abject. Quand le destin se fait l'allié de Satan: si on admet que le Diable est l'artisan du malheur des hommes. On se demande encore et toujours si les increvables Rolling Stones (Brian mis à part hélas) n'ont pas signé un pacte avec la divinité du Mal.


Quoi qu'il en soit, ils sont toujours là...Même si on regrette la disparition d'un tout grand pianiste qui n'a pas eu l'honneur de faire partie officiellement du groupe (ce que l'on peut considérer comme une injustice et une aberration): Ian Stewart. Une immense pointure de la musique. Je tiens ici à lui rendre hommage: on ne pense pas assez à lui. 

 

 

LES PHOTOS D'ETHAN RUSSELL


Ethan Russell est un photographe magistral: tout lecteur s'en rendra compte, s'il ne le sait déjà. Et autant et plus que d'autres, il a le talent de faire éclater ce si curieux magnétisme des Stones, mille fois copié (ou pitoyablement singé), mais jamais égalé dans l'immense imagerie d'Épinal du rock. Aujourd'hui caviardée par des publicitaires, qui vont parfois jusqu'à sponsoriser des groupes quant à leur look.

 

Les Stones présentent un mélange assez fascinant de décadence et d'élégance. Une «décadélégance», si j'ose ce néologisme ! (J'ose.) Un cocktail capiteux et unique qu'ils ont créé. Avec l'aide et l'inspiration d'Oldham (le responsable de la «non-titularisation» de Stewart) ? On peut en discuter à l'infini.

 

Mais aucun manager, aussi roublard et rusé soit-il, ne pourrait créer une personnalité comme Keith Richards par exemple. En p.52, on peut l'admirer, en couleur, arborant une veste marron, un foulard couleur cuivre assorti au pantalon, alors qu'il est assis sur le rebord de la fenêtre d'une maison appelée Oriole House à Los Angeles, occupée par nos héros du rock. Il ressemble à un chef indien paisible. Pose-t-il ou non ? Impossible de le savoir.


De ce naturel bluffant, de cette décontraction suprême vient une partie de son pouvoir de fascination. RIEN ne semble pouvoir le toucher. Un roi du monde, un dieu calme.

 

Il faut le voir pour le croire, p.82 (ici en noir et blanc). Toujours à Los Angeles,dans les coulisses du Forum, sur une moquette épaisse, Keith est étendu au milieu d'une série de gens, Stones et accompagnateurs du groupe, et intervenants divers. Plus relax qu'un grand chat, qui ignore ce qui l'entoure. Il est vrai qu'on ne sait pas ce qu'il avait pu inhaler et/ou avaler, mais tout de même... Un homme qui semble habité d'une grâce spéciale, totalement idiosyncrasique, qui n'appartient qu'à lui et lui seul.

 

Jagger 1969

Mais outre Keith, j'ai été épaté par la grande majorité de ces magnifiques documents dont nous fait bénéficier Ethan Russell. Comme cette rencontre (p.116, n/bl) de Jagger et du très grand BB King: les deux stars - King en est une aussi, bien qu'à un degré commercial moindre - sont prises en un profil particulièrement réussi, et semblent mutuellement impressionnées, l'une par l'autre !

 

Le gros plan couleur de Mick sur scène (p.173) est un petit joyau. Tout comme celui (un portrait en couleur et en gros plan aussi, mais pas sur scène) de Bill Wyman, au charme peut-être plus discret, mais ô combien ravageur et irrésistible. Et il y a d'autres artistes, inattendu(e)s !

 

Si quelqu'un n'aime pas les Stones, en étant un admirateur de Tina Turner (un cas peu probable certes, mais possible dans l'absolu), l'achat de 1969 Année Rolling Stones se justifie: rien qu'à cause de l'extraordinaire gros plan en couleur de dame Tina sur scène, p.122 ! Une pleine page n'aurait pas été de trop ici. Sublime, mais le sujet s'y prête.


La photo n/bl en p.100-101 montrant Keith recevant une pile de billets des mains de Ronnie Schneider (un de leurs collaborateurs) est particulièrement parlante: le pourvoyeur de cash tient une liasse -verte fatalement, il faut faire appel à notre imagination pour la couleur ! -...en bouche !
Et qu'il est craquant - huée à Oldham - le Ian Stewart, en smoking blanc, p.87 ! En noir et blanc, il joue au porteur de guitares, au pluriel; il en tient deux. Non, il y a erreur de casting je trouve... Ian Stewart est une STAR méconnue, tant pis pour le paradoxe ! Mais sa musique reste à jamais, celle de celui qui étincelle avec Led Zeppelin, sur le merveilleux Boogie With Stu (1971, mais paru en 1975 sur Physical Graffiti).  

 


 

ÉPILOGUE


Un des meilleurs biographes des Stones, voire le meilleur...jusqu'à l'arrivée dans cette sphère éditoriale de l'indépassable Bill Wyman, est le journaliste Stanley Booth, déjà cité plus haut. La phrase qui suit est de lui, reprise par Russell, et elle me paraît parfaitement significative pour clore cette chronique.


«Beaucoup de gens à l'époque pensaient que la musique et la danse pouvaient jouer un rôle considérable dans le changement de structure de la société. Peut-être étaient-ils naïfs, mais ils étaient beaucoup plus intéressants que les gens sensés qui allaient les suivre.» La lecture d'une telle déclaration ne peut que nous procurer une vraie...satisfaction !

 

LE COIN DES SPÉCIALISTES

 

Ne vous laissez pas prendre ! L'affiche du concert gratuit des Stones, vue en 2007 lors d'un pèlerinage de Russell sur les lieux (en fait, il en a découvert  deux !), est un FAUX !

 

 

On n'a pas pu en imprimer, faute de temps. Celle que l'on voit dans la somme monumentale de Bill Wyman: Rolling With The Stones (édition française mars 2003 chez Epa), se trouve p.352, et correspond à ce qu'en écrit Russell: il s'agit d'un faux, mal fichu, avec une photo...de 1972 ! Un petit clin d'oeil aux collectionneurs.
Un titre illustre de 1969, orthographié erronément à plusieurs reprises, est bien Honky Tonk Women, non Honky Tonk Woman au singulier. 

 

Et p.200, ils n'étaient pas complètement «stones», mais «stoned» (défoncés)...Il suffit de penser à Stoned, leur première face B officielle ! 


Enfin, une erreur de Stanley Booth, qui prend un de ses premiers chocs musicaux (p.14) pour une chanteuse aussi noire que possible...La très talentueuse chanteuse blanche Ella Mae Morse ! Dès cette époque, bien avant les Stones, le joyeux mélange, la bienfaisante fusion et confusion des cultures du peuple, blanche et noire. Un relais que prit avec maestria «LE PLUS GRAND GROUPE DE ROCK AND ROLL DU MONDE».

 

CHRISTIAN NAUWELAERS